Rocamadour - Etape 4
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A Rocamadour, on retrouve Saint-Michel, ou plus exactement l’épée de Roland, Durandal, que Saint-Michel a saisie à Roncevaux au moment de la mort du héros pour aller la ficher dans le roc de la falaise de Rocamadour…
Patrick Burensteinas devant la falaise du site de Rocamadour
Le site de Rocamadour est étrange : le sanctuaire est suspendu dans la falaise qui surplombe la petite rivière de l’Alzou. Il semble presque inaccessible. Il faut passer une porte mystérieuse surveillée par un gardien dont le visage peu avenant se dessine juste dans les rochers du versant opposé de la vallée.
Dans la falaise qui fait face à Rocamadour, on peut distinguer les traits d’un visage immémorial
C’est que, comme par hasard, cette quatrième étape de notre voyage alchimique est cruciale et se situe au point médian de la série.
Après avoir évoqué les éléments culturels et techniques de l’alchimie, nous allons rencontrer directement dans la nature les forces secrètes qui fondent l’art alchimique.
Pour cela, il faut passer la porte avec le consentement du gardien qui n’est autre que l’image de nos préjugés. Soit nous ne verrons qu’une jolie promenade en sous-bois, soit nous aurons l’impression de communiquer avec les forces cachées de ce qu’on appelle les élémentaux, les « génies » qui animent, entre autres, les quatre éléments, l’eau, le feu, l’air et la terre.
La porte que surveille le gardien…
Nous serons en contact avec de très lointaines tradition, dont la plus récente expression est le sanctuaire chrétien de Rocamadour.
Nous découvrons d’abord le tombeau de Saint Amadour, creusé dans le rocher. Mais le tombeau est vide. Pourquoi ?
Il y a bien longtemps, la légende raconte qu’un ermite vivait dans une grotte au voisinage de ce qui deviendra Rocamadour. Un jour, des pèlerins de Saint-Jacques trouvèrent dans cette grotte le corps non décomposé de l’ermite. Ils lui creusèrent un tombeau, celui qu’on voit aujourd’hui, et lorsqu’ils déplacèrent le corps pour le mettre dans le tombeau, le saint se réduisit en poussière. Les énergies de la grotte où il avait vécu et où il était mort auraient conservé intact le corps de l’ermite. Mais en le déplaçant, on s’était éloigné du point de croisement de ces énergies, ce qui expliquerait la destruction du cadavre
Aujourd’hui, l’épée de Roland apportée par Saint-Michel surplombe le tombeau. Elle rappelle les énergies particulières qui sont présentes autour de Rocamadour et que l’alchimiste se doit de rencontrer et de maîtriser s’il veut réussir son Oeuvre et donc percer les secrets qui sont à l’intérieur de la nature.
Malgré le tombeau, malgré l’épée de Roland, malgré la célèbre Vierge noire, malgré l’impressionnant chemin de croix, les énergies qu’il faut trouver ne sont pas à Rocamadour qui n’en est que la porte d’entrée, la fameuse porte qu’il faut franchir, sous la chapelle Saint-Michel, justement… Une « porte entre les mondes ».
Après avoir reçu l’agrément du gardien, on retraverse le sanctuaire pour accéder à la vallée
Une fois la porte franchie, nous descendons au fond de la vallée que surplombe Rocamadour. Nous trouvons d’abord une source, la « fontaine Berthiol » : ce sont évidemment les énergies de l’eau qui sont présentes ici, mais pas seulement : nous pouvons observer des salamandres : ces petits animaux couleur de feu qui sont le symbole du feu. François 1er, brûlé au visage, l’avait expérimenté, au point d’en faire son emblème : les esprits de l’eau et du feu sont rassemblés ici : les ondines et les salamandres… Ce qui évoque à l’alchimiste le mercure (principe féminin, l’eau) et le soufre (principe masculin, le feu), qu’il doit à son tour essayer de réunir…
Un autre gardien surgit : le rocher du loup, comme si la nature prenait des formes pour nous parler.
Plus loin d’autres esprits nous apparaîtront. Pas directement à nos yeux, mais dans un monde parallèle. A nos yeux et à notre caméra, ce sont seulement des signes qui se manifestent : sur des pierres, des nuages, ou des arbres qui prennent des formes particulières, comme le rocher en forme de loup qui semble surveiller l’entrée de la vallée.
Le voyage alchimique est proche du fantastique : près d’un vieux moulin (à eau), les élémentaux de l’air viennent à notre rencontre : Patrick Burensteinas dialogue avec le vent, avec les esprits du vent que sont les sylphes… Ils semblent lui obéir… L’eau, le feu, l’air se mélangent…
Il reste la terre et son « petit peuple » qu’on découvre au pied d’un autre moulin : les trolls, ou les gnomes que Blanche Neige avait croisés avec les célèbres « sept nains » malicieux et travailleurs. Ils vont aider l’alchimiste à ouvrir la matière, comme si, lui aussi,creusait une mine à l’intérieur de son creuset.
De même, les salamandres vont aider l’alchimiste dans son laboratoire : il va dialoguer avec elles, avec l’esprit du feu : alors le feu de bois atteindra la température requise pour faire fondre l’antimoine, la matière première de l’alchimiste. Une température qu’un simple feu de bois ne peut atteindre…
Les salamandres, les élémentaux du feu ont répondu à l’appel de l’alchimiste pour faire fondre le minerai d’antimoine
Après de nombreuses opérations réitérées, l’alchimiste découvre qu’en refroidissant, la matière se cristallise de façon de plus en plus géométrique, en se simplifiant jusqu’à faire apparaître une étoile à cinq branches, qui se dessine sur le régule d’antimoine…
On est bien au cœur de notre voyage, à mi-chemin, très précisément. Nous venons de découvrir qu’une étoile à cinq branches apparaît dans la matière, comme si une étoile était « tombée dans la terre », ce qui évoque la « quintessence » chère à Rabelais, la rose à cinq pétales, et… la ville de Compostelle, où « l’étoile est tombée dans la terre »…
Une fois qu’il est refroidi, un peut couper le régule en deux pour voir comment il s’est cristallisé: on devine l’étoile à cinq branches sur la partie droite de l’image.
A Rocamadour, la nature nous a dévoilé le sens profond de notre voyage alchimique…